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Enjeux politiques : Quel est le lien entre les États-Unis et le secteur manufacturier canadien?

Enjeux politiques : Quel est le lien entre les États-Unis et le secteur manufacturier canadien?

Le secteur manufacturier canadien est un élément crucial de notre économie.

19 novembre 2024

Le secteur manufacturier canadien est un élément crucial de notre économie. Il emploie 1,7 million de Canadiens, génère plus de 10 % du PIB national et représente plus de 68 % de l’ensemble des biens physiques exportés. Il fait également partie intégrante des relations commerciales complexes entre le Canada et les États-Unis, avec des exportations atteignant près de 30 milliards de dollars par mois.

Risques et incertitudes pour le secteur manufacturier canadien


Depuis le début du 21e siècle, le secteur manufacturier fait face à des défis internes au pays, notamment un fardeau fiscal et réglementaire élevé, des pénuries de main-d’œuvre et de compétences, une productivité anémique et des investissements insuffisants. Elle doit également composer avec des menaces externes. 

Compte tenu du rôle du secteur manufacturier dans nos relations économiques avec les États-Unis, où la plupart de nos importations et exportations sont des intrants intermédiaires utilisés par les producteurs pour fabriquer un autre produit, le secteur est souvent affecté par les changements dans les politiques, les réglementations et les tarifs douaniers des États-Unis.

Les priorités exactes de la présidence Trump restent inconnues pour le moment, mais nous savons que, si aucune mesure n’est prise pour renforcer le secteur manufacturier canadien, les quatre prochaines années pourraient avoir des conséquences potentiellement graves pour de multiples industries.

Un protectionnisme grandissant aux États-Unis


Ces derniers temps, un consensus bipartisan se dessine aux États-Unis sur les politiques protectionnistes « Buy America », qui vont à l’encontre de l’objectif de coopération économique nord-américaine. Pendant la campagne électorale, le président Trump a souvent répété que les tarifs douaniers étaient une mesure qu’il comptait mettre en place. En effet, il souhaiterait imposer des droits de douane variant entre 10 et 50 % sur l’ensemble des importations américaines.

Il est impossible de prédire le chiffre sur lequel il jettera son dévolu, mais, même s’il se trouve à l’extrémité inférieure de l’échelle, les répercussions économiques seront importantes. Dans le nouveau rapport du Laboratoire de données sur les entreprises, Des partenaires pour la prospérité : étude de l’importance des échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis, l’auteur Trevor Tombe prévoit qu’un tarif douanier de 10 % entraînerait une baisse de 22 % des exportations canadiennes d’énergie et de produits manufacturés et une réduction de près de 1 % de la productivité du travail!

L’examen de l’ACEUM en 2026


L’objectif de l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) est la coopération économique nord-américaine. Depuis l’entrée en vigueur de l’accord en 2020, le commerce nord-américain a augmenté de 47 %, sans compter la création de 4 millions d’emplois supplémentaires soutenus par ces échanges.

Le 1er juillet 2026, les trois pays participants décideront s’ils prolongent l’ACEUM pour une nouvelle période de 16 ans. Dans le cas contraire, un examen annuel aura lieu jusqu’à ce que l’accord prenne fin en 2036.

Enfin, même si l’ACEUM a été introduit et adopté sous la première administration du président Trump, cela ne signifie pas pour autant que l’accord est hors de danger. Au cours de la récente campagne électorale, le président Trump a déclaré qu’il avait l’intention d’ouvrir l’accord commercial avec le Canada et le Mexique. 

En tant que nation commerçante, la réussite économique du Canada dépend de ses relations avec les États-Unis et le Mexique, qui sont respectivement nos premier et troisième partenaires commerciaux. Même la promesse de modifications de l’ACEUM pourrait entraîner une incertitude en matière d’investissement pour les fabricants, ce qui pousserait les entreprises manufacturières canadiennes à s’implanter dans d’autres pays où les barrières à l’importation et les restrictions commerciales sont moindres. La préservation de l’ACEUM revêt une importance capitale si nous voulons maintenir la libre circulation des marchandises entre le Canada et les États-Unis et préserver la nature intégrée des opérations de fabrication et des chaînes d’approvisionnement de l’Amérique du Nord.

Lire « Enjeux politiques : Voici quelques raisons de s’inquiéter de l’avenir l’ACEUM » pour en apprendre davantage sur l’accord et ce qu’il représente pour le Canada.

Lire notre mémoire adressé à Affaires mondiales Canada au sujet de l’examen conjoint de l’ACEUM en 2024.

L’industrie automobile


L’industrie automobile canadienne est l’un des plus grands secteurs manufacturiers du pays, employant directement près de 120 000 personnes et contribuant à hauteur de 12,5 milliards de dollars au PIB. Les véhicules à moteur et leurs pièces détachées sont la deuxième importation américaine la plus importante pour le Canada.

La loi sur la réduction de l’inflation, introduite en 2022 par l’administration Biden, a eu des répercussions sur l’industrie automobile canadienne. Dans le rapport du Comité permanent du commerce international, intitulé Répercussions commerciales sur certains secteurs canadiens de la loi américaine de 2022 sur la réduction de l’inflation, le Comité a compilé les témoignages des témoins, dont certains s’inquiètent du fait que l’IRA est un acte de protectionnisme commercial et qu’il « cherche à “forcer la délocalisation” de certaines capacités de production automobile de l’étranger vers les États-Unis, au détriment du Canada et d’autres pays ». 

Il s’agit peut-être d’une loi de l’ère Biden, mais M. Trump ne semble pas s’opposer à la délocalisation de l’industrie automobile américaine. Pendant sa campagne, il a annoncé des droits de douane de 100 % sur les voitures fabriquées au Mexique afin d’encourager l’industrie automobile américaine. Il a également promis de lever les obligations relatives aux véhicules électriques et de rapatrier la production aux États-Unis, en mettant l’accent sur la création d’emplois dans des États comme la Pennsylvanie et la Géorgie.

Les échanges de véhicules à moteur et de pièces détachées sont largement équilibrés entre les États-Unis et le Canada. Si une administration Trump devait introduire des politiques plus protectionnistes dans l’industrie automobile, cet équilibre pourrait basculer en faveur des États-Unis, réduisant l’accès au marché du Canada et entraînant une augmentation des coûts de production et des complications. À son tour, cette situation exercerait une pression sur notre transition vers les VE et réduirait les possibilités pour les sociétés canadiennes de bénéficier d’initiatives de collaboration en matière de R&D avec des sociétés américaines.

L’autonomie industrielle


Compte tenu de l’incertitude et des risques qui planent sur l’industrie manufacturière canadienne, le Canada devrait renforcer son secteur manufacturier pour ne pas laisser son destin et sa prospérité aux mains de l’administration américaine actuelle et future.

Recommandations

  • Diversifier les marchés d’exportation actuellement exploités par le Canada vers les États-Unis en explorant les débouchés en Europe, dans la région indopacifique et dans d’autres régions, par le biais de missions et d’accords commerciaux ciblés.
  • Garantir la continuité des chaînes d’approvisionnement cruciales en conférant au gouvernement le pouvoir de trancher les litiges par le biais d’une décision obligatoire.
  • Introduire des crédits d’impôt à l’investissement ciblés pour stimuler l’innovation et la productivité dans le secteur manufacturier.
  • Moderniser le cadre réglementaire canadien afin d’accroître l’investissement, la croissance économique et l’emploi. Cela passe par l’élimination des règlements désuets, compliqués, qui entravent l’innovation, augmentent les coûts et nuisent à notre compétitivité.
  • Obliger les organismes de réglementation à adopter une optique économique pour soutenir la croissance économique et la compétitivité.
  • Accélérer la reconnaissance des diplômes pour permettre aux travailleurs qualifiés d’utiliser pleinement leurs compétences là où on en a besoin dans tout le pays.
  • Renforcer la convergence des réglementations canadiennes et américaines.

Une politique industrielle harmonisée intégrant les recommandations proposées placerait les fabricants canadiens dans les meilleures conditions pour innover, se développer et s’étendre.

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